2025.09.19 Maître Tony Tshibanda Tondoyi, Avocat au Barreau du Haut-Katanga à Lubumbashi (RDC) 2025.09.19 Maître Tony Tshibanda Tondoyi, Avocat au Barreau du Haut-Katanga à Lubumbashi (RDC) 

Me Tony Tshibanda espère qu'en RDC «la justice refleurira un jour»

Le 20 septembre se tient le premier jubilé dédié aux acteurs du monde de la justice aussi bien séculière, canonique qu’ecclésiastique. Juges, procureurs, magistrats, avocats, praticiens du droit y sont particulièrement invités. Dans une interview accordée à Radio Vatican, Maître Tony Tshibanda Tondoyi, avocat au barreau du Haut-Katanga à Lubumbashi, dans la partie sud est de la République démocratique du Congo, plaide pour une justice qui tienne compte du plus petit.

Jean-Paul Kamba, SJ – Cité du Vatican

«Comme pèlerins de l'espérance, nous sommes tous invités à travailler pour l'avènement de la justice, un appel pressant, plus particulièrement pour nous en République démocratique du Congo, où la guerre et les conflits, devenus cycliques, ne cessent d’éprouver les communautés et déchirer les familles, entraînant une crise humanitaire dans cette partie de l'Afrique», estime d’emblée l’avocat qui souligne que cette espérance ne peut se conjuguer sans la justice et ce, à tous les niveaux de la vie nationale. «Nous sommes tous appelés à construire un monde de justice», dit-il, en insistant sur le fait que les praticiens de droit et tous ceux qui travaillent dans le secteur de la justice ont, à cet égard, une responsabilité particulière.

Un constat désolant

«Je dois admettre que la justice n'est pas parfaite un peu partout dans le monde, mais en République démocratique du Congo, il y a lieu de se demander s’il y a encore un peu de justice», déplore Me Tshibanda qui, au regard des antivaleurs dans le secteur de la justice, partage la désolation du président congolais qui qualifiait de malade, la justice de son pays. «Même les récents états généraux de la justice organisés par le ministère de la Justice n'ont rien accouché de bon», se désole-t-il d’avantage en se demandant quel remède faut-il appliquer «afin de redorer l'image de la justice congolaise qui ne bénéficie guère de la confiance du peuple».

En outre, l’avocat congolais se plaint d’un «système judiciaire gangréné par la corruption, la concussion, le trafic d'influence, l'arbitraire, et le déni de justice». Il n'y a presque pas de justice, dit-il en précisant «d'ailleurs, ici, chez nous, nous avons pris l'habitude de le dire, la justice a déjà déménagé du palais de justice».

Non à l’instrumentalisation de la Justice

«Par moment, la justice est devenue un instrument de répression, de règlement des comptes politiques, d'intimidation et d'écrasement du faible», observe, non sans regret, Me Tshibanda qui constate que parmi les architectes de ces antivaleurs, se trouvent également des chrétiens, toutes confessions confondues.

Le CEMABAC, une lueur d’espoir

Afin de vivre leur foi de manière authentique dans un contexte marqué par des multiples compromissions, les avocats et magistrats chrétiens se sont réunis dans une structure appelée: Consortium des Magistrats et Avocats Baptisés Catholiques (CMABAC). Il s’agit d’une initiative lancée, il y a peu, par l’archevêque métropolitain de Lubumbashi, Mgr Fulgence Muteba. Le but en est de promouvoir l’éthique chrétienne au sein du système judiciaire congolais à travers des programmes de formations, retraites et partage d’expériences.

Sur terrain, le CMABAC assiste les indigents qui ne peuvent pas assumer les frais de justice, interviennent dans les dossiers de l'archidiocèse liés par exemple aux spoliations des terrains, etc.

La justice, un instrument d'espérance?

Pour Me Tshibanda, la justice est véritablement un instrument d'espérance chrétienne. «La justice et l'espérance s'embrassent. Elle est source d'espérance, de paix et est nourrie par l'amour», affirme-t-il en indiquant que cette justice n'est pas que judiciaire. «Il s'agit aussi de la justice sociale, l'égalité dans l'accès aux droits sociaux et à la protection, la justice distributive et la justice salariale». Toutefois, l’avocat souligne qu’il est possible de «vivre cette justice si chacun en devient un instrument». L’absence de la justice, dit-il, engendre des ressentiments qui débouchent sur la violence et l'impunité.

La justice élève une Nation

Me Tshibanda déplore «une justice des plus forts sur les plus faibles, des riches sur les pauvres, de ceux qui ont le pouvoir sur les gouvernés». Cet état des choses, dit-il, ne peut pas élever une Nation. Évoquant le prophète Michée, prophète de la justice, l'avocat invite tous les ouvriers de la justice à «traiter les faibles avec beaucoup d'amour et à travailler pour un monde juste. Ce qui se passe à l’Est du pays est le résultat de l’impunité, donc du manque de justice» exhorte-t-il en restant optimiste qu’avec l’implication de tous, «la justice va refleurir un jour».

Entretien avec Maître Tony Tshibanda Tondoyi, Avocat au Barreau du Haut-Katanga à Lubumbashi

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19 septembre 2025, 18:56