Cardinal Onaiyekan: «Nous vivons dans la peur au Nigeria»
Myriam Sandouno – Cité du Vatican
La situation demeure inquiétante au Nigeria, pays le plus peuplé du continent africain avec 230 millions d’habitants. Environ 46 % de la population est chrétienne et vit majoritairement dans le Sud, contre 53 % de musulmans majoritairement implantés dans le Nord.
Ce pays ouest-africain est confronté à de multiples défis sécuritaires, en particulier dans la région Nord-Ouest où les terroristes font la loi, ou encore au Nord-Est, foyer de l'insurrection jihadiste Boko Haram qui, selon les estimations des Nations unies, a fait plus de 40 000 morts et déplacé plus de deux millions de personnes depuis 2009.
Appel du Pape Léon XIV
Les enlèvements de masse d’élèves, les rapts de prêtres, de religieux, de séminaristes et fidèles catholiques, les massacres de chrétiens, se sont amplifiés ces dernières semaines. Une situation qu’a dénoncé le Pape Léon XIV dimanche 23 novembre, lors de la prière de l’Angélus place Saint-Pierre. Le Saint-Père avait lancé un «appel à la libération immédiate des personnes enlevées», exhortant les autorités nigérianes à «prendre les décisions appropriées et rapides pour assurer leur libération».
Persécutions et discriminations
Selon l’archevêque émérite d’Abuja, le gouvernement peine à prendre ses responsabilités. «Les chrétiens, affirme le cardinal John Onaiyekan, souffrent depuis bien longtemps des persécutions et discriminations dans certaines régions». Évoquant la question de la charia, il explique qu’«il y a 10 ans, quelques États du Nord ont déclaré la charia comme loi de leur État. C’est contraire à la constitution du pays, mais ils l’appliquent». «Nous vivons dans la peur, raconte le cardinal nigérian: cette semaine, deux prêtres ont été enlevés. Il y a aussi eu cet enlèvement des 25 écolières par un groupe d’hommes armés dans le Nord-Ouest. Mais pas seulement ça, il y a quelques jours, des terroristes ont attaqué une église non catholique, ils ont enlevé le pasteur, plus de 30 personnes priaient dans cette église. Ils ont tué deux ou trois personnes». «C'est vraiment incroyable», déplore l’archevêque émérite d’Abuja.
Chrétiens et musulmans ensemble pour une sortie de crise
Dressant ce triste tableau de la situation actuelle au Nigeria, le cardinal John Onaiyekan invite les autorités à agir au plus vite et à «considérer les plaintes des chrétiens qui continuent de subir les persécutions et discriminations» dans certains États. «Beaucoup de chrétiens estiment qu’il urge, avec la communauté musulmane du pays, d’affronter ensemble ces problèmes qui perdurent», affirme le cardinal. Pour lui, il est aujourd’hui important de «ne pas présenter cette situation comme un problème entre chrétiens et musulmans». «Dans cette ligne, poursuit-il, nous n’aurons pas de solutions».
Coopération sécuritaire avec les États-Unis
Ce lundi 24 novembre, les autorités nigérianes ont annoncé renforcer leur coopération sécuritaire avec Washington et nié à nouveau toute persécution ciblant des chrétiens, après des rencontres bilatérales à Washington. Début novembre, le président américain Donald Trump n’avait pas exclu une intervention militaire au Nigeria, dénonçant des «massacres de chrétiens».
Au moins 50 des plus de 300 élèves enlevés vendredi dans une école catholique de l'ouest du Nigeria se sont échappés, tandis que 38 fidèles kidnappés récemment dans leur église ont tous été secourus par les forces de sécurité, a annoncé dimanche 23 novembre, le président nigérian Bola Tinubu.
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