Conférence pour le lancement du ''Lumsa University Africa Center''. Conférence pour le lancement du ''Lumsa University Africa Center''. 

L'éducation, un pont entre l'Europe et l'Afrique

À l'université Lumsa, une table ronde a permis de faire point sur la coopération entre les deux continents et sur les projets de formation des jeunes Africains. Du ''Lumsa Africa Center’’ au ''Campus Africa'' de l'Unesco, en passant par l'accord entre l'Iccrom et la Fabrique de Saint-Pierre. «L'éducation est à la fois victime et solution de tous les conflits», a déclaré Stefania Giannini, directrice générale adjointe de l'Unesco, aux médias du Saint-Siège.

Valerio Palombaro - Cité du Vatican

Les dynamiques démographiques opposées de l'Europe et de l'Afrique créent une complémentarité entre les deux continents que le monde de l'éducation peut mettre à profit pour favoriser le développement. C'est le message principal qui est ressorti à l'université Lumsa lors de la table ronde «Éducation, compétences et croissance en Afrique et en Europe», à l'occasion du lancement du ''Lumsa University Africa Center'' ouvert il y a quelques semaines dans l'université romaine.

L'heure de la construction

Richesses souterraines, potentiel de développement économique, niveaux d'éducation et d'emploi en hausse, avec une population prévue de 2,5 milliards d'habitants d'ici 2050 (dont la moitié âgée de moins de 14 ans), l'Afrique est le partenaire naturel et irremplaçable d'une Europe en déclin démographique et en ralentissement économique. «C'est un moment historique où nous devons construire», a déclaré Francesco Bonini, recteur de la Lumsa, en ouverture de la conférence. «Pour nous, il est naturel que cette construction, cette projection, se tourne vers l'Afrique, qui est notre présent et notre avenir», a-t-il ajouté.

Développement du capital humain

Une projection qui part des nombreux jeunes d'Afrique. «La croissance», a souligné Stefania Giannini, directrice générale adjointe de l'Unesco pour l'éducation, «n'est pas seulement économique, mais aussi individuelle», comme le développement d'un «capital humain». «En 2050, un jeune sur trois dans le monde sera africain. Et les 450 millions de jeunes Africains d'aujourd'hui correspondent numériquement à l'ensemble de la population européenne», a expliqué Stefania Giannini, annonçant le lancement de ‘‘Campus Africa’’, un projet basé sur deux priorités de l'Unesco: celle de l'égalité des sexes, pour donner des opportunités aux jeunes femmes, et celle qui se résume dans le fait qu'«il n'y a pas d'avenir pour le monde sans avenir pour l'Afrique».

‘‘Campus Africa’’, fondé sur le consensus des 194 États membres de l'Unesco, vise à mettre en relation les institutions «autour de trois priorités»: renforcer les structures de recherche; promouvoir la collaboration et la mobilité des jeunes universitaires; réaligner les programmes d'études et les besoins du marché du travail pour les jeunes Africains. «La plateforme multilatérale joue un rôle fondamental dans la mise en œuvre de ce projet», a précisé Stefania Giannini. «L'éducation est à la fois victime et solution de tous les conflits, de toutes les tensions, y compris des crises environnementales», a affirmé la directrice adjointe de l'Unesco aux médias du Saint-Siège en marge de l'événement. «Il faut donc la protéger lorsqu'elle est victime», et c'est là que s'applique la déclaration sur la protection des écoles contre les attaques militaires, «mais il faut aussi se rappeler que sans une éducation efficace, de qualité et inclusive pour tous, il n'y a pas d'espoir». Stefania Giannini a également réaffirmé que «l'Afrique est un continent dont l'avenir dépendra fondamentalement de ce capital de jeunes en pleine explosion, qui devrait doubler d'ici 2050» et qui compte déjà aujourd'hui environ 450 millions de jeunes Africains.

En ce qui concerne le droit à l'éducation, la directrice adjointe a rappelé que «l'Unesco fête cette année ses 80 ans et que des progrès ont été réalisés». En 1948, a-t-elle révélé, «la population des enfants en âge scolaire ayant accès à l'éducation à l'échelle mondiale était de 47%. Aujourd'hui, la scolarisation primaire est presque universelle». Cependant, «plus de 260 millions d'enfants ne sont pas scolarisés; environ la moitié d'entre eux se concentrent sur le sous-continent africain et ce que nous faisons, c'est rappeler aux gouvernements, par un appel fort, que l'éducation est l'investissement le plus efficace à long terme, mais aussi à court terme». Malheureusement, a-t-elle noté, l'objectif fixé par l'Unesco «il y a dix ans, à savoir investir 4 à 5 % du PIB national dans l'éducation et 15 à 20 % des dépenses publiques, y compris l'aide au développement, n'est pas respecté par la majorité des pays. Notre combat est donc de nature politique et culturelle».

L'accord entre l'ICCROM et la Fabrique de Saint-Pierre

La conférence à la Lumsa a également été l'occasion d'échanger sur un autre projet concret. Il a été présenté par Aruna Francesca Maria Gujiral, directrice générale du Centre international d'études pour la conservation et la restauration des biens culturels (Iccrom), qui a signé il y a quelques semaines un accord avec le président de la Fabrique de Saint-Pierre au Vatican, le cardinal Mauro Gambetti. La Fabrique de Saint-Pierre, par l'intermédiaire de son École des arts et métiers, est ainsi prête à ouvrir les portes de la basilique vaticane à de jeunes artistes et artisans africains qui seront accueillis pour une période de formation. Les compétences acquises devront ensuite être partagées avec les connaissances traditionnelles de leurs pays, dans le cadre d'un processus qui sera guidé par des institutions partenaires en Côte d'Ivoire, en Égypte, au Kenya et en Tunisie. «Une fois leur expérience terminée, ces jeunes apporteront de nouvelles opportunités dans leurs pays d'origine», a fait savoir Maria Gujiral, précisant que la formation est prévue pour six mois à Rome et six mois dans leur pays d'origine. Selon les informations disponibles, dans le cadre de ce projet, l'Iccrom vise à former au total plus de 500 jeunes en trois ans, dont 60 au Vatican par groupes de vingt chaque année.

Le ''Lumsa Africa Center''

Outre ses activités de recherche, le Lumsa Africa Center mise beaucoup sur la formation: une procédure de sélection est déjà ouverte pour l'attribution de 10 bourses d'études pour participer à une expérience de mobilité internationale à l'Université catholique d'Afrique de l'Est, qui se déroulera à Nairobi (Kenya) du 14 février 2026 au 1er mars 2026. «Le Lumsa Africa Center est le fruit du pacte éducatif mondial» promu par le Pape François, a indiqué le directeur du centre, l'ambassadeur Pietro Sebastiani. «L'idée est née de la prise de conscience que les étudiants doivent avoir une vision de l'image que l'Afrique a dans le contexte mondial», a-t-il noté, espérant que l'éducation servira à «briser les stéréotypes». «L'Europe n'a pas de marge de croissance à l'intérieur de ses frontières, c'est pourquoi le partenariat avec l'Afrique doit être égalitaire, mais il est inévitable». «Je crois que chacun doit apporter sa pierre à l'édification d'une meilleure compréhension et d'un dialogue accru», a-t-il également souligné aux médias du Vatican. «De cette manière, on peut vraiment parler une langue commune: celle de la formation et de l'éducation», a-t-il ajouté.

Croissance économique et emploi

La formation doit toutefois aller de pair avec la croissance économique. Cleophas Adrien Dioma, président exécutif de l'Italia-Africa Business Week, a souligné que «jusqu'à présent, la coopération manquait de dimension commerciale» et qu'«on ne peut pas envisager de former les jeunes s'il n'y a pas de croissance». «La pyramide démographique de l'Europe et de l'Afrique est inversée», a insisté Federico Bonaglia, directeur adjoint du Centre pour le développement de l'OCDE. Citant certaines études de l'OCDE, comme celle selon laquelle en Afrique du Sud, près de 80 % des entreprises se plaignent de ne pas trouver de travailleurs possédant les compétences requises, Federico Bonaglia a souligné que «la formation est un sujet de rencontre et que chacun, en investissant, sert ses propres intérêts et ceux de sa communauté».

Selon Lorenzo Ortona, vicaire de la structure de mission-présidence du Conseil de mise en œuvre du Plan Mattei, «la formation sur place en Afrique est fondamentale pour répondre aux besoins du marché africain»: d'ici la fin de l'année, par exemple, le nouveau centre Enrico Mattei en Algérie devrait être mis en service pour la formation agricole. «En Europe, certains métiers ont disparu», a-t-il conclu, en évoquant la collaboration en cours avec la Confindustria, -la Confédération générale de l'industrie italienne-, afin de mettre en œuvre les dispositions du décret sur les flux migratoires visant à créer près de 500 000 emplois pour les migrants.

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16 septembre 2025, 13:07