Le Pape encourage à raviver la conscience de notre vocation missionnaire
Fabrcie Bagendekere, SJ – Cité du Vatican
Environ 40 000 fidèles étaient présents à cette célébration eucharistique qui a eu lieu sur la place Saint-Pierre. La coïncidence des deux Jubilés a offert une occasion au Pape qui a été longtemps missionnaire chez des peuples en quête d’espérance, au Pérou, de «raviver en chacun la conscience de la vocation missionnaire» qui selon lui, «naît du désir d'apporter à tous la joie et la consolation de l'Évangile, en particulier à ceux qui vivent une histoire difficile et blessée». Il a également mis l'accent sur la situation des migrants qui ont dû «quitter leurs terres, souvent en laissant leurs proches, traversant des nuits de peur et de solitude, vivant dans leur chair la discrimination et la violence». Aussi, a-t-il rappelé le devoir de l’Église: «Toute l'Église est missionnaire, et il est urgent – comme l'a affirmé le Pape François – qu'elle ‘‘sorte pour annoncer l'Évangile à tous, en tous lieux, en toutes occasions, sans délai, sans répulsion et sans crainte’’», a dit Léon XIV. (Voir François, Exhortation apostolique Evangelii gaudium, 23).
Le mal a une échéance
«L'Esprit nous envoie poursuivre l'œuvre du Christ dans les périphéries du monde, parfois marquées par la guerre, l'injustice et la souffrance», a affirmé le Souverain pontife, indiquant que face à ces scénarios sombres, resurgit le cri qui s'est souvent élevé vers Dieu au cours de l'histoire: «Pourquoi, Seigneur, n'interviens-tu pas? Pourquoi sembles-tu absent?». Ce cri de douleur, a dit le Saint-Père, est «une forme de prière qui imprègne toute l'Écriture», se référant ici au livre du prophète Habacuc que la liturgie du jour proposait à la méditation: «Jusqu'à quand, Seigneur, implorerai-je ton aide sans que tu m'écoutes [...]. Pourquoi me fais-tu voir l'iniquité et restes-tu spectateur de l'oppression ?», clame le prophète aux deuxième et troisième versets du premier chapitre de son livre. Pour amplifier ces lamentations, Léon XIV a recouru à la pensée du Pape Benoît, qui, après sa visite à Auschwitz affirmait dans sa catéchèse du 14 septembre 2011: «Dieu se tait, et ce silence déchire l'âme de celui qui prie, qui appelle sans cesse, mais sans trouver de réponse. [...] Dieu semble si lointain, si oublieux, si absent». L'évêque de Rome a par ailleurs fourni une réponse à ce questionnement: «Si le prophète dénonce la force inéluctable du mal qui semble prévaloir, le Seigneur, quant à lui, lui annonce que tout cela aura une fin, une échéance, car le salut viendra et ne tardera pas», a déclaré le Souverain pontife.
La foi ne s’impose par la puissance mais se réalise dans les petits gestes de chaque jour
Face à l’épreuve et la souffrance, Léon XIV nous indique la foi comme arme de résistance et de persévérance. «Il y a donc une vie, une nouvelle possibilité de vie et de salut qui vient de la foi, car elle nous aide non seulement à résister au mal en persévérant dans le bien, mais elle transforme notre existence au point d'en faire un instrument du salut que Dieu veut encore aujourd'hui opérer dans le monde», a dit le Pape. Il ensuite expliqué que, comme Jésus nous le dit dans l'Évangile, il s'agit d'une force douce: «la foi ne s'impose pas par la puissance et de manière extraordinaire; il suffit d'un grain de sénevé pour faire des choses impensables (cf. Lc 17, 6), car elle porte en elle la force de l'amour de Dieu qui ouvre des voies de salut», a affirmé Léon XIV.
Il a par ailleurs relevé le rôle de chacun dans cette réalisation. «C'est un salut qui se réalise lorsque nous nous engageons personnellement et que nous prenons soin, avec la compassion de l'Évangile, de la souffrance de notre prochain; c'est un salut qui se fraye un chemin, silencieusement et apparemment inefficace, dans les gestes et les paroles quotidiennes, qui deviennent comme la petite graine dont nous parle Jésus; c'est un salut qui grandit lentement lorsque nous devenons des ‘‘serviteurs inutiles’’», a-t-il indiqué, pour qui, «nous devenons vraiment serviteurs», «lorsque nous nous mettons au service de l'Évangile et de nos frères sans rechercher nos propres intérêts, mais uniquement pour apporter l'amour du Seigneur dans le monde». C’est avec ce souhait que Léon XIV a appelé à «renouveler en nous le feu de la vocation missionnaire».
Aujourd'hui, les frontières de la mission ne sont plus géographiques
Entamant ensuite une réflexion sur le sens de la mission et du missionnaire, le Pape est arrivé à la conclusion qu’«aujourd'hui s'ouvre une nouvelle ère missionnaire dans l'histoire de l'Église». «Si, pendant longtemps, nous avons associé la mission au ‘‘départ’’, au fait d'aller vers des terres lointaines qui n'avaient pas connu l'Évangile ou qui vivaient dans la pauvreté, aujourd'hui, les frontières de la mission ne sont plus géographiques, car la pauvreté, la souffrance et le désir d'une plus grande espérance viennent à nous». Il en a pris pour témoin l'histoire de tant de migrants, «le drame de leur fuite devant la violence, la souffrance qui les accompagne, la peur de ne pas y arriver, le risque de traversées périlleuses le long des côtes maritimes, leur cri de douleur et de désespoir». Selon Léon XIV, «notre mission doit consister à ce que ces bateaux qui espèrent apercevoir un port sûr où s'arrêter, et ces yeux chargés d'angoisse et d'espoir qui cherchent une terre ferme où accoster, ne peuvent et ne doivent pas trouver la froideur de l'indifférence ou la stigmatisation de la discrimination.»
Chacun de nous doit agir dans la mesure de ses possibilités
Le Saint-Père a par ailleurs avisé que tant il ne s'agit pas de «partir», il ne s’agit non plus de «rester» pour le simple fait de rester, mais pour annoncer le Christ à travers l'accueil, la compassion et la solidarité: «rester sans se réfugier dans le confort de notre individualisme, rester pour regarder en face ceux qui arrivent de terres lointaines et martyrisées, rester pour leur ouvrir les bras et le cœur, les accueillir comme des frères, être pour eux une présence de consolation et d'espoir». Il a mentionné ici les nombreux missionnaires, mais aussi les croyants et les personnes de bonne volonté, «qui travaillent au service des migrants et pour promouvoir une nouvelle culture de fraternité sur le thème des migrations, au-delà des stéréotypes et des préjugés». Ce précieux service, a-t-il dit, «interpelle chacun de nous, dans la mesure de ses modestes possibilités». «Le moment est venu, de nous constituer tous en ‘‘état permanent de mission’’, se référant dans cette dernière expression à son prédécesseur le Pape François.
Coopération missionnaire et vocation missionnaire
Pour répondre à cet appel, le Pape recommande deux grands engagements missionnaires: la coopération missionnaire et la vocation missionnaire. Concernant la première, le Saint-Père demande de «promouvoir une coopération missionnaire renouvelée entre les Églises». Il exhorte à ce que dans «les communautés de tradition chrétienne ancienne» comme celles d'Occident, la présence de nombreux «frères et sœurs du Sud du monde» soit considérée comme «une opportunité d'échange qui renouvelle le visage de l'Église et suscite un christianisme plus ouvert, plus vivant et plus dynamique». Il invite en même temps chaque missionnaire à «habiter les cultures qu'il rencontre avec un respect sacré, en orientant vers le bien tout ce qu'il trouve de bon et de noble, et en y apportant la prophétie de l'Évangile».
Quant à la vocation missionnaire, Léon XIV rappelle tout d’abord «la beauté et l'importance des vocations missionnaires», lui qui a été longtemps missionnaire loin de sa terre natale. Aussi, s’adressant de façon particulière à l'Église européenne, le Pape a renouvelé l’appel à l’engagement missionnaire. «Aujourd'hui, il y a besoin d'un nouvel élan missionnaire, de laïcs, de religieux et de prêtres qui offrent leur service dans les terres de mission, de nouvelles propositions et expériences vocationnelles capables de susciter ce désir, en particulier chez les jeunes».
Que chacun de nous devienne collaborateur du Royaume du Christ
Pour conclure son exhortation, le Saint-Père a exprimé toute son affection et donné sa bénédiction «au clergé local des Églises particulières, aux missionnaires et à ceux qui sont en discernement vocationnel». Aux migrants, le Pape a dit en ces termes: «Soyez toujours les bienvenus!». Il leur a souhaité de trouver le «visage de Dieu dans les missionnaires» qu’ils rencontreront, rappelant que «les mers et les déserts que vous avez traversés sont, dans les Écritures, des ‘‘lieux de salut’’, où Dieu s'est rendu présent pour sauver son peuple».
Confiant tous à l'intercession de Marie, «première missionnaire de son Fils, qui marche rapidement vers les montagnes de Judée, portant Jésus dans son sein et se mettant au service d'Élisabeth», le Pape a imploré son soutien, «afin que chacun de nous devienne collaborateur du Royaume du Christ, Royaume d'amour, de justice et de paix».
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