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Des participants à la conférence internationale dédiée aux théologiennes africaines, organisée du 7 au 10 mars à Jesuits Hekima University College (Nairobi-Kenya) Des participants à la conférence internationale dédiée aux théologiennes africaines, organisée du 7 au 10 mars à Jesuits Hekima University College (Nairobi-Kenya) 

Kenya: clôture de la conférence sur les théologiennes africaines

La Conférence internationale sur les théologiennes africaines, organisée par l’université jésuite Hekima à Nairobi, s'est clôturée le dimanche 10 mars 2024. À travers des présentations enrichissantes et des échanges interactifs, les participantes à ces assises ont mis en avant l’importance d’une approche inclusive reconnaissant et valorisant les voix des femmes africaines dans l’Église.

Christian Kombe, SJ et Camille Mukoso, SJ - Nairobi

Durant quatre jours d’intenses travaux, des théologiennes, dont certaines de renommée mondiale, ont partagé leurs recherches sur les multiples facettes de la synodalité, dans des domaines aussi variés que la théologie systématique, les sciences bibliques, le droit canonique, la théologie pastorale, les peace studies, etc. La professeur Shawn Copeland, qui a eu l’honneur d’ouvrir la série de conférences, a captivé l’auditoire avec une présentation sur la théologie en tant que «carrefour de la foi et de la culture». Elle a souligné que la théologie ne peut se limiter à une simple référence au règne de Dieu, mais doit également s’ériger en rempart contre les injustices et les oppressions, revendiquant ainsi une dimension politique: «La théologie doit se tenir debout pour aborder les problèmes des opprimés et des vulnérables. C’est pourquoi elle doit être politique».

Une Église pour tous, sans exception

S’inspirant de son expérience en tant que femme africaine et tirant parti de sa participation à la première session du synode sur la synodalité à Rome, Mme Nora Nonterah a ensuite souligné le rôle essentiel des femmes en tant que gardiennes de la sagesse et évangélisatrices dans la tradition africaine, remettant ainsi en question les préjugés sur les rôles de genre dans l’Église. Elle a également indiqué que la responsabilité de l’évangélisation incombe à tous les baptisés, qu’ils soient prêtres, religieux ou religieuses, laïcs ou consacrés.

La Bible et les constructions du genre

Les jours suivants ont suivi une trajectoire similaire, explorant des thèmes variés et établissant des liens entre différentes disciplines. La deuxième journée a placé la réflexion sur les sciences bibliques et la synodalité au cœur des débats. La religieuse et bibliste nigériane, Teresa Okure, a invité l’audience à une réflexion collective sur l’égalité des genres. Avec toute l’érudition et la maîtrise des textes bibliques qui la caractérise, la sœur Okure a également exposé comment les récits de l’Ancien Testament, notamment ceux du livre de la Genèse, peuvent servir de modèles pour la résolution des conflits et la construction de la paix.

Des participants à la conférence internationale dédiée aux théologiennes africaines
Des participants à la conférence internationale dédiée aux théologiennes africaines

Synodalité et communication

Une exploration passionnante des liens entre les plateformes numériques et la synodalité a également marqué cette journée. La Sœur Henriette Anne Owino, originaire du Kenya, a souligné l’importance des nouvelles technologies de l’information et de la communication, affirmant que ces plateformes offrent une opportunité pour partager les perspectives des théologiennes africaines. Elle a insisté sur le fait que leurs voix uniques sont essentielles pour façonner le récit de la synodalité, encourageant les femmes consacrées à s’engager dans ce domaine numérique avec confiance: «Les religieuses africaines devraient plonger dans ce domaine numérique, confiantes que leurs contributions auront un impact durable».

Synodalité et paix  

La troisième journée, axée sur la «construction de la paix et de la synodalité», a débuté avec l’intervention de la sœur José Ngalula, religieuse de Saint-André. En tant que première femme africaine à rejoindre la Commission théologique internationale et participante au synode sur la synodalité à Rome, elle a apporté une perspective unique sur les enjeux contemporains de la foi. Dans son exposé, la religieuse congolaise a mis en avant l’importance de l’écoute, indiquant que celle-ci implique un engagement éthique à cheminer aux côtés des autres et à être ouvert à l’expérience et à la sagesse d’autrui. Elle a affirmé que l’écoute authentique exige une liberté totale pour répondre à tous les appels de l’esprit. La religieuse congolaise a illustré son propos en évoquant le parcours de Joséphine Bakhita, une ancienne esclave devenue sainte, qui a pris la parole devant une cour italienne pour exprimer son refus de rester esclave.

Cette dernière journée a été également marquée par la présentation de la sœur Ivonne Akundo, qui a apporté un éclairage percutant sur la crise anglophone au Cameroun. La religieuse camerounaise a souligné les obstacles rencontrés dans le processus de dialogue, pointant du doigt un agenda préétabli qui limitait les discussions aux sujets considérés comme sensibles, notamment le fédéralisme et la sécession. Selon elle, cette exclusion de thèmes cruciaux a entravé les efforts de résolution de la crise. En outre, Sr Ivonne Akundo a mis en évidence le manque d’inclusivité du dialogue, notant que seuls les membres de "groupes modérés" ont été conviés, et même alors, en tant qu’individus plutôt que sous l’égide de groupes organisés: «cette exclusion des voix divergentes et des représentants de diverses communautés a contribué à l’inefficacité du processus de dialogue et a entravé la recherche de solutions durables à la crise anglophone».


La Vierge Marie, théologienne?

La conclusion des conférences a été marquée par une messe d’action de grâce présidée par Mgr Rodrigo Meija, SJ, évêque émérite de Soddo, en Éthiopie. Dans son homélie, Mgr Rodrigo a interrogé les participantes à ces assises sur la pertinence du titre de «théologienne» pour la Vierge Marie. Selon lui, une théologie dépourvue de l’expérience directe de Dieu et du monde demeure «un simple exercice spéculatif». Il a ainsi suggéré que Marie mérite le titre de «théologienne», car «sa connaissance de Dieu découle d’une expérience vécue de la divinité ainsi que des réalités humaines de la vie». Avant la dispersion finale, les participantes ont eu l’occasion de visiter Nairobi et de participer à une soirée dansante, alliant ainsi l’utile à l’agréable.

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12 mars 2024, 10:49