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Lors d'une session de formation à "l'école de la synodalité à Dakar, Sénégal Lors d'une session de formation à "l'école de la synodalité à Dakar, Sénégal 

Sœur Faye: «la synodalité est une réalité au Sénégal»

«L’Église au Sénégal manifeste une pleine volonté de faire de la synodalité une culture ecclésiale et non un simple événement ponctuel», c’est ce que révèle sœur Béatrice Faye religieuse sénégalaise et responsable de «l’École de la Synodalité» dans son pays. Elle en veut pour preuve le plan d’actions pastoral 2025-2028 de l’archidiocèse de Dakar.

Entretien réalisé par Françoise Niamien – Cité du Vatican

Plus de 2000 personnes, membres des équipes synodales et des organes de participation sont à Rome du 24 au 26 octobre pour leur Jubilé. Cet événement jubilaire est une étape importante dans la phase de mise en œuvre des orientations issues du Document final de la XVIe Assemblée ordinaire du Synode des évêques sur la Synodalité.
Sœur Anne Béatrice Faye, religieuse sénégalaise de la Congrégation de l'Immaculée Conception de Castres était au nombre des participants des deux sessions du Synode sur la synodalité à Rome (2021-2024). À la faveur du Jubilé des équipes synodales, et dans un entretien accordé à Vatican News, la religieuse revient sur l’appropriation du Document final de cette Assemblée synodale tout en mettant en exergue l’expérience de la synodalité de l’Église au Sénégal particulièrement celle de l’archidiocèse de Dakar.

Entretien avec Sœur Béatrice Faye, religieuse sénégalaise

En guise de rappel, que pouvons-nous retenir des conclusions de l’Assemblée ordinaire du Synode des évêques sur la Synodalité?

Nous pouvons retenir qu’il a voulu renouveler la manière d’être et de vivre en Église. Il nous invite à marcher ensemble, évêques, prêtres, religieux et laïcs dans un esprit d’écoute, de participation et de co-responsabilité. De ce fait, j’estime que les points saillants à retenir sont au préalable: la conversion pastorale qui nous exhorte à passer d’une Église de structures à une Église de relations, centrée surtout sur la communion, la participation et la mission. Ensuite, nous avons à retenir l’importance de l’écoute mutuelle et du discernement communautaire comme méthodes permanentes de gouvernance ecclésiale. En outre, les conclusions de cette Assemblée synodale mettent l’accent sur la participation de tous les baptisés, notamment des femmes, des jeunes et des personnes en marge, dans la vie et surtout les décisions de l’Église. Soulignons également la dimension missionnaire que la synodalité nous a constamment rappelée. Effet, la synodalité n’est pas une fin en soi, mais un chemin pour être davantage au service de la justice, de la paix et de la dignité humaine. Enfin des conclusions du synode sur la synodalité, nous devons retenir la nécessité d’un style ecclésial humble et participatif, où l’autorité se vit comme un service et où la diversité devient une richesse à partager.


Comment l’Église au Sénégal s’est-elle appropriée ces conclusions contenues dans Document final?

En ce qui concerne l’Église au Sénégal, nous pouvons indiquer qu’à travers ses diocèses et particulièrement celui de Dakar, elle s’est saisie de ces conclusions avec un réel sens de l’engagement. J’en veux pour preuve l’élaboration du plan d’actions pastoral 2025-2028 de l’archidiocèse de Dakar qui, à mon avis, est une traduction concrète de cette appropriation. Ce plan pastoral a été conçu selon une démarche participative et inclusive, fidèle à l’esprit du Synode. Le comité de rédaction a réuni des prêtres, des laïcs, des religieuses et des experts, tous impliqués dans le discernement et la planification pastorale.
Ce plan est fondé explicitement sur le Document final du Synode sur la Synodalité, la déclaration de la 5ᵉ Assemblée plénière de la Conférence épiscopale régionale de l'Afrique de l’Ouest, CERAO, et sur l’expérience concrète des communautés chrétiennes sénégalaises. L’Église au Sénégal manifeste ainsi une volonté forte de faire de la synodalité une culture ecclésiale, et non un simple événement ponctuel. Dans ce sens, «l’école de synodalité» de Dakar se veut un espace d’écoute et de partage d’expérience. Elle offre des formations sur la synodalité en se basant surtout le Document final et tous les autres documents qui ont accompagné la démarche synodale.

Comment l’Église au Sénégal vit-elle la synodalité?

À mon avis, le vécu de la synodalité s’observe aujourd’hui à plusieurs niveaux: tout d’abord la gouvernance diocésaine, les conseils pastoraux, économiques et éducatifs qui intègrent une représentation plurielle avec des femmes, des jeunes, des communautés, et aussi des mouvements d’action catholique. Cela ressort du plan d’action pastorale de l’archidiocèse de Dakar.
On observe également cette traduction du vécu de la synodalité dans la formation, la catéchèse et les sessions de base qui mettent désormais l’accent sur la formation à l’écoute, à la co-responsabilité et à la mission. Dans la vie paroissiale, on note également une multiplication d’initiatives inclusives: les célébrations interculturelles, l’engagement des jeunes, l’implication des familles, et aussi le dialogue interreligieux et œcuménique. De même, je peux souligner la dynamique diocésaine. De mon point de vue, le plan d’action pastorale de l’archidiocèse de Dakar souligne la mise en place d’un comité de pilotage et d’un comité de suivi-évaluation, garants d’une mise en œuvre collégiale et transparente de la synodalité. Cette synodalité vécue devient une manière de travailler ensemble, une «marche dans l’Esprit » qui donne à l’Église du Sénégal un visage de proximité, de service et de communion.

Pouvons-nous affirmer que l’Église au Sénégal est ancrée dans la synodalité? 

Il serait trop prétentieux de l’affirmer de cette façon. Toutefois, nous observons plusieurs signes tangibles qui témoignent de cette volonté de s’approprier cette manière d’être Église aujourd’hui. Et cette volonté s’observe à travers la vision de Mgr André Gueye qui, dès son arrivée à la tête de l’archevêque de Dakar, a manifesté sa volonté de faire de cette Église locale, une Église synodale au service de la justice et de la paix qui reprend la dynamique synodale mondiale.
En outre, il y a une méthodologie synodale qui découle du plan d’action pastoral qui a été conçu dans la prière, l’écoute et la participation de toutes les forces vives du diocèse, y compris les laïcs et les femmes. De plus, nous avons des structures de participation effective que sont les conseils paroissiaux représentatifs, les équipes inter-doyennés, les assemblées décanales, les forums des jeunes et des familles. Nous avons également l’école de synodalité qui organise des formations pour approfondir le sens de l’Église synodale.
De mon point de vue, il y a une dynamique d’inclusion avec les minorités, les personnes en situation de handicap, les communautés étrangères, explicitement mentionnées comme bénéficiaires d’une attention pastorale prioritaire. Le souci d’évaluation et de redevabilité est une autre preuve du vécu de la synodalité de l’Église au Sénégal. Le système de suivi-évaluation permanent traduit une volonté de transparence et de co-responsabilité, typique d’une Église synodale. À mes yeux, tous ces éléments démontrent qu’au Sénégal, la synodalité n’est plus un discours, mais une pratique ecclésiale en train de s’enraciner ce n’est pas un acquis, mais une dynamique qui est enclenchée.

Comment arriver à faire de la synodalité un mode permanant de vie?

Pour y parvenir il est primordial de mettre un accent particulier sur la formation à la Synodalité. Et cette formation doit commencer dans les séminaires, les écoles de théologie, les mouvements et les communautés. La formation doit s’articuler autour de l'écoute, du discernement et gouvernance participative. Il y a également la nécessité de renforcer les structures de dialogue et de décision partagée, du niveau paroissial jusqu’à la province ecclésiastique. La promotion de la place des femmes et des jeunes dans les espaces décisionnels et dans la mission d’évangélisation constitue un autre élément qui pourrait aider à enraciner davantage la synodalité. Il est également nécessaire d’encourager l’autonomie et la créativité locale parce qu’une Église synodale doit être aussi économiquement et institutionnellement responsable, en développant des projets durables dans les domaines de l’éducation, de la santé, de l’écologie, et des projets de solidarité en direction des plus démunis.
Pour moi, vivre cela inclut la synodalité comme spiritualité et non comme une technique, mais bien plus une manière d’être disciples du Christ ensemble, à l’écoute de l’Esprit et au service du monde.
Ainsi, l’Église du Sénégal, fidèle à son histoire d’écoute, de dialogue et d’engagement social, pourrait poursuivre son chemin pour devenir une Église-famille de Dieu synodale, autonome, au service de la justice et de la paix.

Au regard de tout ce qui précède quel est votre mot de la fin?

Il convient de retenir que l'Église au Sénégal, et particulièrement l'archidiocèse de Dakar, est engagée dans la synodalité à travers son plan d'action pastorale 2025-2028, vers une plus grande appropriation du Document final de la XVIe Assemblée ordinaire du Synode des évêques sur la Synodalité.

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25 octobre 2025, 23:06