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Les signataires de la nouvelle Charta Œcumenica, à Rome, le 6 novembre 2025. Les signataires de la nouvelle Charta Œcumenica, à Rome, le 6 novembre 2025. 

Une nouvelle Charte œcuménique européenne, encouragée par le Pape

Migrants, jeunes, travail équitable et nouvelles technologies: voici quelques-uns des défis qui attendent les chrétiens européens dans le document révisé et signé hier par les présidents du CCEE et de la CEC. «Le texte concerne tout le monde», souligne l'archevêque de Vilnius, président du Conseil des Conférences épiscopales d'Europe.

Cecilia Seppia – Cité du Vatican

Entre guerres, bouleversements géopolitiques et affirmation disruptive des nouvelles technologies, le moment est venu de faire des choix courageux et les chrétiens d'Europe sont appelés à choisir encore, mais d'une manière nouvelle, l'unité dans la diversité, l'unité dans la foi en Christ, le dialogue et le lien sacré de la paix. Pour répondre de manière ajustée aux changements du monde et aux blessures induites, le Conseil des Conférences épiscopales d'Europe (CCEE) et la Conférence des Églises européennes (CEC) ont décidé de réviser la Charte œcuménique de 2001, pierre angulaire de la coopération œcuménique européenne depuis plus de deux décennies.

Les représentants des deux organismes ont ressenti cette urgence dès 2022, après l'invasion de l'Ukraine par la Russie, et ce mercredi, à Rome, dans l'église du martyre de Saint-Paul, ils ont signé conjointement le document articulé en 5 chapitres et 15 paragraphes. Le Pape a salué la mise à jour de ce texte ce jeudi lors d'une audience au Vatican, y voyant un grand «effort synodal» visant à construire une vision commune face à tous les défis qui attendent les chrétiens.

La Parole de Dieu remise au centre d’un monde sécularisé

«Le Saint-Père nous a encouragés à poursuivre sur la voie de l'œcuménisme, il a réaffirmé l'importance de la mission, d'être témoins sur un continent qui a plus que jamais besoin du message chrétien, et nous accomplissons cette tâche et ce service ensemble depuis des années: nous proposons la centralité de la Parole de Dieu dans une Europe trop sécularisée», déclare Mgr Gintaras Grušas, archevêque de Vilnius et président du CCEE. Le travail œcuménique, ajoute-t-il, est par nature un travail en constante évolution. Il ne s'agit pas seulement de se rapprocher en respectant les particularités de chaque tradition, culture ou confession chrétienne, mais de coopérer, voire de contribuer au bien de l'humanité.

Justice sociale, accueil du migrant

Plusieurs points du programme de la Charte œcuménique ont nécessité une révision, notamment l'engagement en faveur de la réconciliation dans un monde marqué par les guerres, le terrorisme, la violence et l'inhumanité. Les chrétiens d'Europe se font artisans et promoteurs de la paix en soutenant activement les initiatives de médiation et de désarmement.

«Il est également nécessaire de promouvoir la justice économique et sociale à travers des politiques qui servent le bien commun et non les intérêts d'une minorité», souligne Mgr Grušas. «Le monde a changé, l'Europe a changé, nous ne pouvons pas faire comme si de rien n'était. Il y a les défis posés par le phénomène migratoire, par les nouvelles technologies. Nous avons également voulu accorder une plus grande attention aux travailleurs et aux jeunes, dont la participation est fondamentale pour le continent. Nous voulons les aider à relever ces défis et à être des missionnaires». Dénoncer les injustices et les abus économiques qui oppriment les pauvres, promouvoir une culture d'accueil et d'inclusion, notamment en signalant les politiques et les pratiques qui bafouent la dignité humaine: telle est la mission des chrétiens, qui s'engagent également dans la protection des droits fondamentaux des migrants et des réfugiés. «L'Église fait un travail énorme pour aider les migrants et tous ceux qui fuient les guerres. En Ukraine, par exemple, il y a encore des milliers de personnes déplacées à l'intérieur du pays, en plus de celles qui ont quitté leur pays pour rejoindre d'autres nations. Mais le message chrétien reste le même, c'est le message de Jésus, à savoir accueillir l'étranger», note le prélat.

Que l'Ukraine trouve le chemin d'une paix juste

L'archevêque de Vilnius mentionne également les nombreux contrastes qui subsistent en Europe, le fossé entre le Nord et le Sud, entre l'Ouest et l'Est, et ne cache pas ses inquiétudes face à la poursuite de la guerre en Ukraine. «Toute la Charta Oecumenica, commente-t-il, est un signe de cette nécessité de réparer les fractures, car elle unit non seulement des personnes de différentes Églises, de différentes confessions, mais aussi l'Est et l'Ouest, le Nord et le Sud, et recherche l'unité. Et lorsque nous parlons d'unité œcuménique, nous ne faisons pas seulement référence à celle des doctrines, mais aussi au travail commun, à la mission, au témoignage: c'est ainsi qu'il faut évangéliser l'Europe d'aujourd'hui. En Ukraine, nous avons besoin de cette vision, de cette diplomatie, et non d'armes, pour aider les politiciens à œuvrer en faveur de la paix, pour aider les hommes qui vivent dans le besoin, mais surtout, il y a le pouvoir de la prière. Nous aussi, nous devons renforcer notre prière pour la paix, comme le Saint-Père le souligne toujours, et nous devons aussi prier pour le don de la sagesse afin que les politiciens trouvent le chemin d'une paix juste».

Monseigneur Gintaras Grušas, archevêque de Vilnius et président du CCEE.
Monseigneur Gintaras Grušas, archevêque de Vilnius et président du CCEE.

En dialogue avec les minorités

Le président du CCEE répond également à l'invitation lancée par le Pape à accueillir de nouvelles voix et cultures en Europe en œuvrant pour accueillir les communautés chrétiennes qui se découvrent «de plus en plus minoritaires»: «Les catholiques représentent la moitié des chrétiens en Europe et tous les autres, les 50 % restants, c'est pourquoi ce dialogue entre le CCEE et la CEC est très utile ; chaque pays a clairement des proportions différentes en son sein, par exemple dans mon pays, la Lituanie, les catholiques représentent 80 %, les 20 % restants sont composés d'orthodoxes, de luthériens et d'autres, mais il y a aussi des fidèles qui ne sont pas impliqués dans ce dialogue, je pense aux nouveaux mouvements chrétiens, mais le document leur tend surtout les bras, c'est avec eux que nous devons trouver un dialogue, une manière commune d'évangéliser et de diffuser le baptême qui nous réunit comme un seul peuple de Dieu».

Nouvelles technologies et sauvegarde de la Création

La Charte révisée continue de mettre l'accent sur la protection de la Création et la sauvegarde de notre maison commune, déjà envisagées avec clairvoyance en 2001, mais qui sont aujourd'hui encore plus urgentes en raison du changement climatique, de la perte de biodiversité et de l'exploitation incontrôlée des ressources. La question des nouvelles technologies fait désormais partie intégrante du document. «En tant qu'Église, nous sommes appelés à assumer notre responsabilité écologique. C'est pourquoi nous avons écrit une lettre aux gouvernants en vue de la prochaine COP30 sur le climat - conclut Mgr Grušas - afin qu'ils intensifient leurs efforts pour la sauvegarde de la Création ; il y a un problème moral autant qu'objectif, celui de préserver la création comme un don que Dieu nous fait. Quant aux nouvelles technologies et à l'intelligence artificielle, nous reconnaissons leur énorme potentiel en tant qu'outil de communion et de solidarité, mais aussi les risques et le fait qu'elles peuvent être utilisées non seulement pour le bien de l'homme, mais aussi pour le mal». Il est donc nécessaire de mettre en place une éthique numérique fondée elle aussi sur la dignité humaine et le bien commun.

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06 novembre 2025, 18:20