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Le cardinal Parolin en visite auprès de réfugiés près de Pemba au Mozambique, le 9 décembre. Le cardinal Parolin en visite auprès de réfugiés près de Pemba au Mozambique, le 9 décembre.   (AFP or licensors)

Mgr Saure: «Les populations du nord du Mozambique ont tout perdu»

L'archevêque de Nampula, président de la conférence des évêques mozambicains a accompagné le cardinal Parolin durant sa visite pastorale dans le pays du 5 au 10 décembre. Une visite qui a permis notamment de mettre en lumière les souffrances des populations qui ont fui la guerre dans la province septentrionale de Cabo Delgado.

Olivier Bonnel - Cité du Vatican

Du 5 au 10 décembre, le cardinal Pietro Parolin, Secrétaire d’Etat du St Siège s’est rendu au Mozambique pour une visite pastorale, qui s’est inscrite dans le cadre du 30 ème anniversaire des relations diplomatiques entre le Vatican et Maputo. L’occasion pour le cardinal d’apporter l’attention de l’Eglise et de Léon XIV pour la population de ce pays, que le Pape François avait visité en 2019... le Mozambique, grand pays d’Afrique australe dont le nord est depuis 2017 fortement déstabilisé par une guérilla djihadiste... Dans la riche province de Cabo Delgado, des milliers de civils ont dû fuir les combats et vivent dans le plus grand dénuement. Le numéro deux du Saint Siège a pu rencontrer ces populations et écouter leurs souffrances. Il était accompagné par Mgr Ignacio Saure, l’archevêque de Nampula, troisième ville du pays et président de la conférence épiscopale mozambicaine. Celui- revient sur cette guerre qui ronge le nord du pays et le travail sur place de l’Église.

Mgr Saure, président de la conférence épiscopale mozambicaine

Durant cette visite, j’ai pu voir la réalité de la guerre à Cabo Delgado quand elle a commencé en 2017. Trois ans après, nous avons reçu ici un appel de beaucoup de déplacés de guerre venus de cette province. Depuis lors, je suis en contact avec cette situation. Cela m'a donné une fois encore l'opportunité de vivre la réalité de la souffrance de ces gens-là, des déplacés de guerre. Ça a été important aussi pour moi rendre visite aux camps des déplacés de guerre.

Quelle est la situation des personnes déplacées dans cette province de Cabo Delgado qui est, on le sait, marquée par la violence terroriste?

La situation des personnes déplacées est très, très difficile parce que ce sont des gens qui ont tout perdu en quittant leur village, ils sont partis, en fuyant, chercher des lieux plus sûrs sans absolument rien apporter avec eux. Et donc dans les villages, que nous avons visités pas loin de Pemba, nous avons trouvé beaucoup de gens qui disent qu'ils n'ont absolument rien, rien à manger, pas d’eau, il n’y a pas de service de santé, ils manquent de tout.

Comment la visite du cardinal Parolin a-t-elle été vécue par les populations locales ?

La visite a été accueillie avec beaucoup d'espoir, elle a montré que le Saint-Père est toujours en train de suivre la situation à Cabo Delgado. Le Pape François avait lui-même suivi cette réalité-là. Quand les gens ont appris que c'était le cardinal secrétaire d'État qui venait, ils se sont dit que c'est presque le Pape lui-même qui était là, qu'il veut toucher la réalité des souffrances du peuple de Cabo Delgado. Le cardinal a été très bien accueilli. Les gens lui ont parlé en présentant leurs difficultés et en demandant la prière pour que la guerre finisse. Ça a été vécu comme cela.

Comment les gens du nord du pays arrivent à vivre malgré les attaques ? Est-ce que les autorités mozambicaines font suffisamment pour protéger ces populations?

Les autorités mozambicaines essaient de faire quelque chose pour aider ces gens, mais les besoins sont beaucoup plus importants que les capacités qu’ont les autorités. Moi, je ne dirais pas que les autorités ne font rien, ils font quand même quelque chose, mais c'est vraiment insuffisant pour résoudre les très graves problèmes.

Que fait l'Église mozambicaine pour venir en aide à ces populations ? Comment arrive-t-elle à soulager un peu les souffrances de ces gens qui ont tout perdu?

L’Église, notamment les diocèses-ci du Nord, le diocèse de Pemba, l'archidiocèse de Nampula, tous sont mobilisés pour faire quelque chose afin de venir en aide aux déplacés de guerre, notamment à travers la Caritas. Mais malheureusement, nos Caritas diocésaines ont peu de moyens. Ces Caritas dépendent des aides de l'extérieur. Il faut faire des demandes de projets, dont le financement prend parfois du temps. L’Église reste néanmoins très proche de ces déplacés. On trouve des familles chrétiennes qui ont accueilli plusieurs personnes dans leur maison, une famille de cinq personnes dans une petite maison, par exemple, qui a dû accueillir dix réfugiés ou plus.

Des foules de réfugiés près de Pemba, lors de la visite du cardinal Parolin
Des foules de réfugiés près de Pemba, lors de la visite du cardinal Parolin   (AFP or licensors)

Quelles sont vos attentes, que faudrait-il pour que cette situation dans le nord du pays s'arrête, pour qu’un accord de paix soit trouvé?

Je l'ai dit toujours, la réponse ne peut pas être seulement militaire, il faut absolument chercher d'autres possibilités de solutions qui passent par le dialogue, les discussions. Depuis le début de la guerre en 2017, on a toujours dit que c'était un ennemi sans visage, cela fait déjà huit ans. Est-ce que l’on ne connait vraiment pas qui est en train d'attaquer et quels sont ses objectifs? Je pense qu’il faut absolument chercher les véritables causes de cette guerre, et commencer à résoudre les problèmes par la racine. Le plus important maintenant, c'est d'aider les autorités mozambicaines, le Mozambique, à trouver une solution définitive à cette guerre. Il y a aussi les grandes ressources du nord du pays, notamment le gaz et le pétrole et l’or. Toute cette richesse-là est devenue un peu comme une malédiction pour la région et pour le Mozambique. La solution passe donc par le développement,  mais il sera impossible aussi longtemps que durera la guerre.

 

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15 décembre 2025, 14:43