Léon XIV appelle à développer une théologie au service de l'Église et du monde
Jean-Paul Kamba, SJ – Cité du Vatican
«La durabilité environnementale et la sauvegarde de la création sont en effet des engagements indispensables à la survie du genre humain et ont un impact immédiat sur l'organisation de nos sociétés et sur la possibilité d'une coexistence humaine pacifique et solidaire». Le Pape a salué cette question discutée lors des travaux et qui lui est chère ainsi qu’à ses prédécesseurs car, «tout effort visant à améliorer les conditions environnementales et sociales de notre monde exige l'engagement de tous, dans une attitude de solidarité et de collaboration qui dépasse les barrières et les limites régionales, nationales, culturelles et même religieuses».
Se basant sur la lettre apostolique Ad theologiam promovendam de son prédécesseur immédiat, lettre qui mettait à jour les statuts de l'Académie pontificale de théologie en l'appelant à une révolution culturelle courageuse, Léon XIV s’est particulièrement attardé sur l'élan missionnaire et dialogique de la prochaine entreprise théologique.
Nécessité d’une théologie «en sortie»
«L’œuvre d'évangélisation est constamment interpellée par les contextes culturels et nécessite une théologie “en sortie”», a dit le Pape en soulignant qu’une telle théologie devra allier la rigueur scientifique à la passion pour l'histoire. Contre une théologie abstraite, Léon XIV propose «une théologie incarnée, imprégnée des douleurs, des joies, des attentes et des espoirs de l'humanité des femmes et des hommes de notre temps».
De la théologie sapientielle
Pour l’évêque de Rome, la théologie sapientielle peut être regardée comme inspirante, puisqu’élaborée par «les grands Pères et Maîtres de l'Antiquité qui, dociles à l'Esprit, ont su conjuguer foi et raison, réflexion, prière et pratique». Dans la suite, évoquant la théologie augustinienne qui, n’étant pas une recherche purement abstraite, mais le fruit de l'expérience de Dieu et de la relation vitale avec Lui, Léon XIV a expliqué que si la théologie augustinienne avait une empreinte existentielle et affective, saint Thomas d'Aquin pour sa part «l'a systématisé avec les outils de la raison aristotélicienne, construisant un pont solide entre la foi chrétienne et la science de tous, en concevant la théologie comme une sapientia». Dans cette même perspective, le Pape a cité le bienheureux Antonio Rosmini qui «considérait la théologie comme une expression sublime de la charité intellectuelle, tout en demandant que la raison critique de tous les savoirs s'oriente vers l’idée de sagesse».
Une théologie ouverte au dialogue
«La théologie est donc cette sagesse qui ouvre des horizons existentiels plus vastes, en dialoguant avec les sciences, la philosophie, l'art et l'expérience humaine dans son ensemble», a dit le Pape qui a souligné que le théologien ou la théologienne était une personne qui vit l'angoisse missionnaire de communiquer à tous la connaissance et la saveur de la foi, afin qu'elle puisse illuminer l'existence, racheter les faibles et les exclus, toucher et guérir la chair souffrante des pauvres, nous aider à construire un monde fraternel et solidaire et nous conduire à la rencontre avec Dieu. Pour ce faire, le Souverain pontife a invité «à cultiver une théologie fondée sur la rencontre personnelle et transformatrice avec le Christ, et visant à s'incarner dans les événements concrets de l'humanité d'aujourd'hui».
Pour le Pape, le dialogue doit se faire «non seulement avec la philosophie, mais aussi avec la physique, la biologie, les sciences économiques, les sciences juridiques, la littérature, la musique». Un tel dialogue permet de s’enrichir et d'enrichir les autres, afin d'apporter le bon levain de l'Évangile dans les différentes cultures, dans la rencontre avec les croyants d'autres confessions religieuses et avec les non-croyants. Le Pape a donc souhaité que «l'Académie devienne un lieu de rencontre et d'amitié entre théologiens, un lieu de communion et de partage où l'on puisse marcher ensemble vers le Christ».
La foi au service de l’homme
L'Église, aujourd'hui, est appelée à apporter des réponses avisées notamment aux défis numériques. Il s’agit là d’un témoignage significatif de la connaissance de la foi au service de l'homme, dans toutes ses dimensions personnelles, sociales et politiques, a dit le Pape qui a fait remarquer que la théologie était directement interpellée, car une approche exclusivement éthique du monde complexe de l'intelligence artificielle ne suffit pas. Pour lui, il faut plutôt «se référer à une vision anthropologique qui fonde l'action éthique et, par conséquent, revenir à la question de toujours: qui est l'homme, quelle est sa dignité infinie, irréductible à tout androïde numérique?»
Une Académie à trois visages
Le Pape a enfin encouragé et béni le triple «visage» de l'Académie: d’abord académique et scientifique, où s'exercent la rigueur intellectuelle, la recherche et l'étude critique de la foi; ensuite sapientiel, qui représente le moment de la contemplation et du discernement et implique de nombreuses personnes ordinaires à travers les «cénacles théologiques», où la théologie devient prière, écoute et partage, aide à surmonter les fausses images de Dieu et nourrit la vie spirituelle; et enfin, le visage solidaire, qui vise à inspirer et à animer des gestes concrets de charité. La véritable connaissance de Dieu se concrétise en effet dans une vie transformée par l'amour.
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