Léon XIV aux étudiants: «Soyez des prophètes dans le monde numérique!»

Augustine Asta – Cité du Vatican

Devant une assemblée composée d’environ 6 000 étudiants qui participent au Jubilé du monde l’éducation, - qui a commencé lundi 27 octobre avec une messe du Pape en compagnie des étudiants des universités pontificales, et qui s'achève dimanche 2 novembre avec samedi la messe jubilaire en présence de l’évêque de Rome, place Saint-Pierre-, Léon XIV a commencé son adresse en présentant Pier Giorgio Frassati. Il s’agit du jeune étudiant italien canonisé le 7 septembre au cours de cette année jubilaire. Ce nouveau saint, a insisté le Pape, avec «son âme passionné pour Dieu et pour son prochain», avait à cœur deux phrases devenues «presque comme une devise» qu'il répétait souvent: «Vivre sans foi, ce n'est pas vivre, mais vivoter» et «Vers le haut».

Comme le saint italien, le Pape a donc demandé aux étudiants venus des cinq continents, d’avoir «l'audace de vivre pleinement» et de ne pas se contenter «des apparences ou des modes», les encourageant aussi à «à tendre constamment ‘‘vers le haut’’, en allumant le phare de l'espérance dans les heures sombres de l'histoire».

John Henry Newman, futur docteur de l'Église, modèle pour les jeunes

«Le savoir se multiplie lorsqu'il est partagé» et «c'est dans la conversation des esprits que s'allume la flamme de la vérité», disait le saint érudit John Henry Newman, qui sera bientôt proclamé docteur de l'Église. Ainsi, a noté le Pape, «la paix véritable naît lorsque de nombreuses vies, comme des étoiles, s'unissent et forment un dessin».

«Savez-vous combien il y a d'étoiles dans l'univers observable?», a interrogé Léon XIV, rappelant dans la foulée, qu’il est un ancien professeur de mathématiques et de physique. «Même si les étoiles se comptent en milliards de milliards, nous ne voyons que les constellations les plus proches: celles-ci nous indiquent cependant une direction, comme lorsque l'on navigue en mer», a-t-il proposé en guise de réponse.

Depuis toujours, a fait remarquer le Saint-Père, «les voyageurs ont trouvé leur route grâce aux étoiles». Comme eux, a-t-il révélé aux étudiants, des étoiles «vous guident»: et ce sont «vos parents, vos enseignants, vos prêtres, vos amis», a-t-il fait savoir. Pour le Pape, l'éducation «unit les personnes en communautés vivantes et organise les idées en constellations de sens». L'éducation, en effet, a fait remarquer le Souverain pontife, «nous apprend à regarder vers le haut, toujours plus haut».

«Le Pacte éducatif mondial», une nouvelle ère éducative

Pour que cette jeunesse réalise le «rêve» d’être la «génération plus» dont «on se souviendrait pour la plus-value que vous saurez apporter à l'Église et au monde», Léon XIV a prôné l’unité «en témoignant ensemble de la joie de croire au Seigneur Jésus». Et cela est possible, a-t-il poursuivi, grâce à l'éducation, «l'un des outils les plus beaux et les plus puissants pour changer le monde».

Soulignant le grand projet du Pacte éducatif mondial, c'est-à-dire une alliance de tous ceux qui, à divers titres, travaillent dans le domaine de l'éducation et de la culture, afin d'impliquer les jeunes générations dans une fraternité universelle -lancé il y a cinq ans par le Pape François,- le Souverain pontife a précisé que ces étudiants ne sont pas «seulement les destinataires de l'éducation, mais aussi ses protagonistes». C'est pourquoi «je vous demande aujourd'hui de vous allier pour ouvrir une nouvelle ère éducative, dans laquelle tous — jeunes et adultes — nous devenions des témoins crédibles de vérité et de paix», a-t-il recommandé, les appelant par ailleurs à être des «truth-speakers» et des «peace-makers», «des personnes de parole et des artisans de paix». «Impliquez vos camarades dans la recherche de la vérité et dans la culture de la paix, en exprimant ces deux passions par votre vie, par vos paroles et par vos gestes quotidiens», a ensuite détaillé le Saint-Père.

«L'éducation à la vie intérieure»

«Aidez-nous dans l'éducation à la vie intérieure»: c’est le premier des nouveaux défis exprimé par les jeunes, a dit le Souverain pontife, et qui «nous engagent dans notre Pacte éducatif mondial». Surtout dans un contexte marqué par des «épisodes de malaise, de violence, de harcèlement, d'oppression, voire de jeunes qui s'isolent».

Citant saint Augustin dans son autobiographie, Les Confessions, le Pape a souligné ce que signifie éduquer à la vie intérieure. Il s’agit d’«écouter notre inquiétude, ne pas la fuir ni la noyer dans ce qui ne rassasie pas».

L'éducation au numérique

Le deuxième des nouveaux défis éducatifs, a mentionné Léon XIV, est l'éducation au numérique. «Ne laissez pas l'algorithme écrire votre histoire!», a lancé le Saint-Père. Et d’ajouter: «Utilisez la technologie avec sagesse, mais ne laissez pas la technologie vous utiliser».

S’attardant sur l'intelligence artificielle, «l'une des rerum novarum» «de notre époque», le Pape a préconisé d’être «humain avec les autres, en cultivant une intelligence émotionnelle, spirituelle, sociale et écologique». Il faut pour cela, «humaniser le numérique», en «le construisant comme un espace de fraternité et de créativité, et non comme une cage où vous enfermer, une dépendance ou une fuite», a-t-il soutenu. Plutôt que «d'être des touristes sur les réseaux, soyez des prophètes dans le monde numérique!», a-t-il lancé. À cet égard, le Successeur de Pierre a présenté l’exemple très actuel de sainteté de saint Carlo Acutis. Un jeune homme «qui ne s'est pas laissé asservir par les réseaux sociaux, mais qui les a utilisés avec habileté pour le bien». Saint Carlo, a continué le Pape, a «uni sa belle foi à sa passion pour l'informatique, en créant un site sur les miracles eucharistiques, faisant ainsi d'Internet un outil d'évangélisation».

L'éducation à la paix

Le troisième grand défi qui est au cœur du nouveau Pacte éducatif mondial est l'éducation à la paix. Il s’agit, a fait savoir le Pape, d’une «éducation à la paix désarmée et désarmante». En effet, a-t-il continué, il ne suffit pas de «faire taire les armes: il faut désarmer les cœurs, renoncer à toute violence et toute vulgarité», a-t-il invité.