Phénomènes mystiques, le Pape met en garde contre «l'illusion superstitieuse»

Myriam Sandouno – Cité du Vatican

À l’issue de la conférence organisée par le dicastère des Causes des Saints et consacrée au lien entre les phénomènes mystiques et la sainteté de vie, le Pape Léon XIV a reçu en salle Paul VI les différents participants, évoquant la question du mysticisme . Elle «se caractérise comme une expérience qui transcende la simple connaissance rationnelle, non pas grâce au mérite de celui qui la vit, mais grâce à un don spirituel qui peut se manifester de différentes manières», voire par des phénomènes opposés, a expliqué Léon XIV, citant «les visions lumineuses ou une obscurité dense, des afflictions ou des extases».

La communion avec Dieu 

En soi, cependant, clarifie le Saint-Père, «ces événements exceptionnels restent secondaires et non essentiels par rapport à la mystique et à la sainteté elle-même: ils peuvent en être des signes, en tant que charismes singuliers», mais «le véritable but est et reste toujours la communion avec Dieu», a-t-il insisté. Le Souverain pontife a ensuite apporté d’autres précisions, éclairant les esprits: «Les phénomènes extraordinaires qui peuvent caractériser l'expérience mystique, ne sont pas des conditions indispensables pour reconnaître la sainteté d'un fidèle: s'ils sont présents, ils fortifient ses vertus non pas comme des privilèges individuels, mais dans la mesure où ils sont ordonnés à l'édification de toute l'Église, corps mystique du Christ».

Dans l'examen des candidats à la sainteté, a poursuivi le Pape, ce qui importe le plus et qui doit être souligné, «c'est leur conformité pleine et constante à la volonté de Dieu, révélée dans les Écritures et dans la Tradition apostolique vivante. Il est donc important de maintenir l'équilibre: tout comme il ne faut pas promouvoir les causes de canonisation uniquement en présence de phénomènes exceptionnels, il faut veiller à ne pas les pénaliser, si ces mêmes phénomènes caractérisent la vie des serviteurs de Dieu».

Sainte Thérèse d'Avila et saint Jean de la Croix

Face à ses hôtes, Léon XIV s’est ensuite focalisé sur sainte Thérèse d'Avila, la première femme à être proclamée docteur de l’Église, et considérée comme l’une des plus grandes mystiques de l’histoire chrétienne. Originaire de l’Espagne, la réformatrice du Carmel au 16e siècle, affirmait que «la perfection suprême ne réside pas dans les douceurs intérieures, dans les grands extases, les visions et l'esprit de prophétie, mais dans la parfaite conformité de notre volonté à celle de Dieu, en acceptant avec la même joie le doux et l'amer, comme Il le veut». Des propos rappelés par le Saint-Père, et qui «correspondent à l'expérience de saint Jean de la Croix, selon lequel l'exercice des vertus est le germe d'une disponibilité passionnée pour Dieu, de sorte que sa volonté et la nôtre deviennent une seule volonté dans un consentement prompt et libre», «jusqu'à la transformation de l'amant en l'Aimé», a dit le Pape.

Illusion superstitieuse et discernement

En réalité, à travers la réflexion théologique, la prédication ou la catéchèse, «l'Église reconnaît depuis des siècles que la conscience de l'union intime d'amour avec Dieu est au cœur de la vie mystique». «Avec un engagement constant, a rappelé le Pape, le Magistère, la théologie et les auteurs spirituels ont également fourni des critères permettant de distinguer les phénomènes spirituels authentiques, qui peuvent se produire dans un climat de prière et de recherche sincère de Dieu, des manifestations qui peuvent être trompeuses». Afin de ne pas tomber dans «l'illusion superstitieuse», l’évêque de Rome a invité à «évaluer avec prudence de tels événements, à travers un discernement humble et conforme à l'enseignement de l'Église».

Au cœur du discernement concernant un fidèle, a-t-il renchéri, «se trouvent l'écoute de sa réputation de sainteté et l'examen de sa vertu parfaite, en tant qu'expressions de la communion ecclésiale et de l'union intime avec Dieu». Terminant son discours, le Successeur de Pierre a invité ceux qui travaillent dans le domaine des causes de canonisation, «à imiter les saints et à cultiver ainsi la vocation qui nous unit tous en tant que baptisés, membres vivants du seul peuple de Dieu».