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2024.04.15 Monastero Deir Mar Musa, Siria

Méditation du 26e dimanche ordinaire C: Le fossé de l’indifférence

Le père jésuite Michel Segatagara Kamanzi nous introduit à la méditation avec les textes du XXVIème dimanche de l’année liturgique C.

Dans l’évangile de ce dimanche, Jésus s’adresse aux Pharisiens, amis de l’argent, qui le prennent en dérision l’ayant entendu dire : « Vous ne pouvez servir Dieu et l’argent » (Luc 16,13). Jésus a dénoncé leur hypocrisie : « Vous êtes, vous, ceux qui se donnent pour justes devant les hommes, mais Dieu connait vos cœurs ; car ce qui est élevé pour les hommes est objet de dégout devant Dieu » (Luc 16,14-15). Et à présent, il se sert d’une histoire-parabole pour illustrer davantage son enseignement.

Cette parabole présente deux hommes et deux destinées parallèles. Celle d’un homme riche, anonyme, et celle d’un pauvre, Lazare, dont le nom signifie « Dieu a secouru », « Dieu a aidé ». Cet homme riche, sans nom, est décrit par son apparence et son style de vie : vêtu de pourpre et de lin fin, il faisait chaque jour des festins somptueux dans une complète indifférence au pauvre Lazare, couvert d’ulcères, qui gisait à proximité, devant son portail. Ce pauvre n’était apparemment pas un inconnu, l’homme riche connaissait son nom comme le montre la suite de la parabole ! Lazare dans sa pauvreté et son dénuement vivait d’espérance : il espérait ne fût-ce que des miettes tombant de la table du riche pour se rassasier, mais ce sont plutôt les chiens qui se faisaient proches pour lécher ses furoncles.  

Et puis les jours passèrent et la mort arriva, et pour l’homme riche et pour le pauvre Lazare. Lazare fut emporté auprès d’Abraham, notre père dans la foi, notre père dans l’espérance, notre père dans la charité. Auprès du père Abraham, il recevra désormais la consolation. Le riche anonyme fut enseveli et se retrouva dans le tourment au séjour des morts. De là, dans la fournaise, il voit au loin Abraham, qu’il appelle Père, et Lazare auprès de lui, qu’il reconnait et désigne par son nom. Mais, désormais il y a un fossé, un grand abîme, qui le sépare du pauvre Lazare qui demeurait au long des jours devant son portail. Ce fossé qui les sépare, c’est au fond lui-même qui l’a creusé par son indifférence, aveuglé par sa richesse, repus et enivré par ses festins somptueux de chaque jour. Maintenant, dans la tourmente, il se souvient de Lazare qu’il voit au loin et demande à Abraham d’avoir pitié de lui et d’envoyer Lazare étancher sa soif. Mais voilà que le Père Abraham ne peut rien dans l’au-delà face à ce fossé creusé par l’indifférence quotidienne de l’homme riche. Et pour ses cinq frères qui restent en vie, vivant probablement comme lui, dans la richesse et l’indifférence au prochain démuni, il y a « Moïse et les Prophètes » pour les instruire déclare Abraham : qu’ils les écoutent ! C’est cette écoute-obéissance des Ecritures, Loi et Prophètes, qui pourra les convertir, combler le fossé de l’indifférence, et les remettre en relation avec Dieu et leurs prochains avant qu’il ne soit trop tard !  

Que ces frères de l’homme riche qui sont encore dans la maison de leur père, ces frères et sœurs que nous sommes aussi, écoutent et ouvrent leurs yeux, leurs cœurs et leurs mains, pour voir en la bénédiction de la richesse qu’ils ont reçu de Dieu une opportunité pour agir en fils d’Abraham ici et maintenant. Qu’ils écoutent, que nous écoutions les prophètes de Dieu comme Amos dans la première lecture et Paul dans la deuxième lecture adressée à Timothée pour comprendre que la sécurité bâtie sur les richesses matérielles est bien éphémère. La vraie richesse se trouve dans la justice, la compassion, le partage, la sollicitude et la fraternité sans frontières.

27 septembre 2025