La rencontre œcuménique de prière sur les rives du lac d'Iznik (Turquie) pour commémorer le 1700e anniversaire du Concile œcuménique de Nicée, le 28 novembre 2025. La rencontre œcuménique de prière sur les rives du lac d'Iznik (Turquie) pour commémorer le 1700e anniversaire du Concile œcuménique de Nicée, le 28 novembre 2025.   (ANSA)

Mgr Flavio Pace: «Nicée nous ramène à l'expérience originelle de Jérusalem»

Le secrétaire du dicastère pour la Promotion de l'unité des chrétiens, Mgr Flavio Pace, précédemment sous-secrétaire du dicastère pour les Églises orientales, revient sur la portée prophétique de l'événement historique, qui a réuni à Iznik, aux côtés du Pape Léon XIV et du patriarche de Constantinople Bartholomée Ier, de nombreux responsables religieux pour les 1700 ans du concile de Nicée.

Vatican News

Revenir aux origines pour mieux comprendre et approfondir le sens de l'être chrétien dans le monde contemporain. Mgr Flavio Pace, secrétaire du dicastère pour la Promotion de l'unité des chrétiens, retrace la genèse de la rencontre œcuménique de prière vécue à İznik

Quel regard portez-vous sur cette commémoration des 1700 ans de Nicée?

Ce fut une rencontre très attendue, très désirée, très préparée, dans le sens où elle a nécessité de nombreuses heures de discussion, de travail et de mise au point. C'est un événement que nous devons accueillir avec beaucoup d'émerveillement. Nous ne nions pas qu'il y ait des commentateurs, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur de l'Église, qui soulignent davantage les absences que les présences, mais il s'agit néanmoins d'une rencontre historique, car la grande majorité des confessions chrétiennes y était représentée.

J'ai entendu certains des participants, même non catholiques, qui étaient tous très heureux, tous très émus. Ceux qui étaient présents ont certainement gardé dans leur cœur le sentiment de l'absence de quelqu'un que nous n'avons pas oublié, que nous n'avons pas exclu. Le moment culminant a été la récitation du Credo de Nicée-Constantinople. Aujourd'hui, nous avons fait l'expérience réelle de ce «nous croyons», car nous avons vu tous nos représentants le dire ensemble, le cœur ému. Au fond, malgré les siècles, parfois les millénaires, de divisions, de séparations, de tensions qui existent encore en partie, nous réaffirmons le germe, l'essentiel de notre foi, et c'est quelque chose qui nous émeut.

Nous comprenons donc pourquoi, d'une part, le Patriarcat œcuménique et, d'autre part, de nombreux autres responsables religieux, d'abord le Pape François, puis le Pape Léon lui-même, ont eu l'intention de commémorer cet anniversaire. En recevant la délégation orthodoxe, à la veille de la fête des saints Pierre et Paul, Léon XIV a clairement déclaré: «Je serai à Nicée», précisant que la commémoration du Concile serait œcuménique, c'est-à-dire ouverte à tous. C'est ce que nous avons vu et vécu vendredi.

 

Revenons 1700 ans en arrière. L'esprit de cette époque est-il encore vivant et peut-il encore l'être?

De nombreux évêques étaient venus, ce qui était extraordinaire pour l'époque, et cela expliquait la méthode du processus: faire face à une situation difficile qui risquait en quelque sorte de devenir sociale -c'est pourquoi l'empereur s'en préoccupait-, mais qui était interne à la communauté chrétienne. La méthode consistait à écouter et à se réunir, à saisir la voix de l'Esprit, à discerner ce que l'Esprit demandait à l'Église de l'époque et à prononcer une parole qui devenait ainsi une parole de référence. Les divisions elles-mêmes sont restées, car il y avait le parti qui continuait à soutenir l'arianisme, même sur le plan politique, il y avait des tensions, pensons à saint Ambroise de Milan... Les tensions ont continué, mais le cœur était centré sur la préservation de cette règle de foi, qui n'était pas une imposition donnée par une quelconque autorité, mais le fruit d'un discernement né de l'écoute de l'Esprit par tous les pasteurs de l'Église. Cette méthode vaut également pour aujourd'hui, pour toutes les situations.

Nous sommes souvent tentés, à l'intérieur et à l'extérieur de l'Église, lorsqu'il y a des tensions, des difficultés à nous comprendre, de rester divisés, de nous séparer. L'œuvre de l'Esprit, en revanche, nous rassemble, dans l'écoute d'une voix qui n'est plus la mienne, ni la tienne, mais qui, à travers nous, est la voix de l'Esprit et qui, par conséquent, éclaire un choix que nous décidons ensuite d'accueillir ensemble. C'est donc le processus qui est très intéressant, car c'est un processus qui est également vrai aujourd'hui, bien avant l'insistance légitime sur la synodalité, c'est précisément un processus qui convoque l'homme à l'écoute de l'Esprit et crée la communion, crée la communauté.

Il y a 1700 ans, à Nicée, une date commune pour Pâques avait également été décidée. Des progrès ont été faits vers la communion, mais aussi vers l'unité. Cette année, les catholiques et les orthodoxes ont célébré Pâques à une date commune, le 20 avril. Où en sommes-nous dans ces discussions?

L'anniversaire de Nicée a relancé la question. Ce qui est certain aujourd'hui, c'est que d'un côté, on veut en reparler, mais de l'autre, on ne veut pas créer une nouvelle division en en reparlant. Je pense qu'il faudra peut-être faire un pas en arrière pour pouvoir ensuite se réunir à nouveau pour réfléchir et discuter, car toute autre décision créerait de nouvelles divisions. Et ce n'était pas le souhait du Pape François, ce n'est pas le souhait du Pape Léon, et la dimension de l'orthodoxie le sait bien. Mais il y a le désir de se remettre à discuter et de trouver une voie de réponse.

Quelle est la relation de Rome avec le patriarcat de Constantinople?

Nous célébrons bientôt un autre anniversaire: le 7 décembre 1965, pratiquement à la fin du Concile Vatican II, une déclaration commune est signée entre Paul VI et Athénagoras, qui levait les excommunications réciproques datant de 1054. Depuis lors, il existe une dimension théologique du dialogue qui se poursuit avec toutes les Églises orthodoxes et byzantines. Pendant un certain temps, ce dialogue concernait toutes les Églises, mais aujourd'hui, il a quelque peu ralenti, tout en se poursuivant néanmoins. Et puis, surtout, il y a cet échange fraternel entre deux frères, pour lequel il y a toujours une délégation de Constantinople qui vient pour les saints Pierre et Paul et, inversement, il y a toujours une délégation pour la fête de saint André. Je me souviens de ce que le Pape Léon a dit cet été, en juillet, en recevant un pèlerinage conjoint catholique-orthodoxe venu des États-Unis. Il a tout d'abord déclaré avoir été surpris, car ce pèlerinage conjoint aurait été impensable il y a quelques décennies. Ensuite, il a rappelé le titre du pèlerinage, «De la première à la deuxième Rome», puis il a déclaré: «Je vous accueille, je vous souhaite la bienvenue».

Le Pape nous offre ce très beau message qui, selon moi, est une clé que nous devrions garder à l'esprit dans les années à venir: il souligne que le problème n'est pas lié à la discussion d'une première ou d'une deuxième Rome, le problème est que nous sommes tous appelés à revenir à l'expérience originelle de Jérusalem, car sinon nous risquons d'être comme les apôtres qui, alors que Jésus parle du fait qu'il va se rendre à Jérusalem pour donner sa vie, discutent entre eux pour savoir lequel d'entre eux sera le plus grand. Le Pape dit cela, et c'est une très belle chose qui, à mon avis, crée un pont, car dans la bulle d'indiction du Jubilé, le Pape François n'a pas seulement mentionné le Jubilé de l'Espérance, mais il a mis l'accent sur 2033, année où nous célébrerons les deux mille ans de la Rédemption. Je crois que le défi de l'œcuménisme aujourd'hui est que tous puissent revenir à l'expérience originelle de Jérusalem. Car sinon, avec toutes les superstructures historiques, qui sont tout à fait compréhensibles d'un point de vue théologique, il n'y aurait eu ni Antioche, ni Alexandrie, ni Rome, ni Constantinople, ni Moscou sans Jérusalem. Et en ce moment, dire Jérusalem, dire le Cénacle qui est le lieu du don de la vie de Jésus et du don du Saint-Esprit, voilà pourquoi nous avons besoin d'y retourner.

Un chrétien réconcilié est un artisan de paix qui œuvre en des lieux marqués par les conflits. Au Proche-Orient, à Gaza, mais aussi en Ukraine et dans tant d'autres contextes de guerre, l'humanité est blessée...

Dans cet événement de Nicée, qui a été rendu possible grâce au courage de quelques hommes qui l'ont voulu, qui l'ont vécu et qui continueront à le vivre, réfléchissons à ce que signifient les trois années de vie publique de Jésus, de 2030 à 2033, cela fera deux mille ans, ce que signifie être à l'écoute pour préparer la possibilité de redire ensemble, par exemple, le discours de la montagne, les béatitudes. Il existe également un mouvement de différentes confessions chrétiennes qui commence à envisager de se rendre au mont des Béatitudes pour répéter ensemble le discours des Béatitudes, mais pas simplement pour faire quelque chose d’archéologique, d’historique, d’exégétique, mais pour le redire au monde, en ce lieu, en reprenant conscience de la mission que le Seigneur nous a confiée. C'est-à-dire que lorsqu'il nous dit «vous êtes le sel de la terre, vous êtes la lumière du monde», dans le discours sur la montagne, il nous dit ce que nous sommes. Nous devons alors le vivre. D'autant plus que, et nous citons ici directement le Pape, l'utilisation de la religion pour justifier la guerre et la violence sous toutes ses formes de fondamentalisme et de fanatisme doit être rejetée avec force. Les voies à suivre sont celles de la rencontre fraternelle, du dialogue et de la collaboration.

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30 novembre 2025, 12:00