À l’ère du numérique, les supérieux appelés à cultiver la prière et la fraternité

Moriba Camara, S.J. - Cité du Vatican

Le Saint-Père Léon XIV a rencontré les membres de l’Union des Supérieurs généraux (USG) exprimant sa joie d’être parmi eux: «Je suis heureux de vous rencontrer, j'ai moi aussi exercé le ministère qui vous est confié», a-t-il affirmé, rappelant l’importance de «se retrouver ensemble pour écouter et discerner, ce que le Seigneur vous demande» pour le bien de l’Église. Le thème choisi pour cette assemblée, «Foi connectée: vivre la prière à l'ère numérique», touche trois domaines cruciaux: la relation à Dieu, la fraternité et le rapport au monde numérique.

«Prenez soin de votre vie intérieure»: la relation fondatrice avec Dieu

Le Saint-Père a rappelé que la première tâche des consacrés est de nourrir leur communion avec le Seigneur. Citant Spes non confundit, il a évoqué les paroles du Pape François: «L'histoire de l'humanité et celle de chacun de nous ne courent pas vers un point aveugle ou un gouffre obscur, mais sont orientées vers la rencontre avec le Seigneur de la gloire […]: c'est dans cet esprit que nous faisons nôtre l'invocation émue des premiers chrétiens, par laquelle se termine toute l'Écriture: "Viens, Seigneur Jésus !" (Ap 22,20)». Cette espérance, a-t-il souligné, s’enracine dans la conscience que Dieu «s’est offert lui-même comme source de notre foi, de notre charité et de notre espérance».

Le Pape a également repris la sagesse de saint Bernard, pour qui la vocation religieuse est un désir ardent de Dieu, en d’autres termes, c’est un «saint, pieux, doux et bon désir: saint, parce qu'il vient de Dieu ; pieux, parce qu'il nous rend pieux ; doux, parce que plein de joie ; bon, parce qu'il nous conduit au souverain bien» (Sermo 2,1). C’est pourquoi il a exhorté les Supérieurs à la vigilance spirituelle: «Prenez soin, avant tout, de votre vie intérieure, de la prière personnelle et communautaire, de l’écoute de la Parole et de l’Adoration Eucharistique». Ce n’est qu’ainsi, a-t-il affirmé, que les consacrés peuvent être «des guides sages pour vos communautés» et contribuer pleinement à la mission d'évangélisation de l’Église.

La fraternité: un témoignage prophétique dans un monde divisé

Évoquant le second axe de réflexion, Léon XIV a rappelé que «la sequela Christi est un chemin que l’on parcourt ensemble, où personne ne peut se sauver seul» (cf. Fratelli tutti, 32). La vie religieuse, a-t-il insisté, est appelée à refléter cette dynamique. L’Union des Supérieurs Généraux constitue, selon le Pape, un instrument d’unité dans la diversité des charismes: «Je vous encourage à continuer de cultiver la fraternité entre les différents Ordres et Congrégations, à dépasser les fermetures et les tentations d'autoréférentialité, à échanger vos expériences et vos dons, à donner vie à des projets de collaboration et de mission communes», a-t-il déclaré. Dans un monde marqué par les divisions, la communion entre les Ordres et Congrégations devient un «signe prophétique d’espérance», une anticipation de la Jérusalem céleste.

Intégrer avec discernement le monde numérique

Le troisième aspect du discours a porté sur les défis que pose le numérique à la vie religieuse. Les technologies, a reconnu le Saint-Père, sont un soutien pour l’évangélisation. Elles «offrent des outils utiles pour l’évangélisation et la communication» et permettent de relier des communautés éloignées ou frappées par la guerre et la persécution. Mais l’accès illimité aux contenus virtuels peut aussi fragiliser la profondeur des relations: «Il est facile de se laisser tenter par l’idée de substituer la simple connexion virtuelle aux relations réelles», a mis en garde le Pape, rappelant l’enseignement de Christus vivit (88).

Il a invité les Supérieurs à protéger l’authenticité des relations fraternelles, les chapitres, conseils, visites canoniques ou moments de formation «ne peuvent pas être relégués au domaine des connexions à distance». «L’effort de se retrouver ensemble pour dialoguer et se confronter fait partie intégrante de notre identité évangélique», a affirmé Léon XIV. La mission qui attend les communautés religieuses est donc d’intégrer harmonieusement les richesses anciennes et les outils nouveaux. Un défi d’équilibre «entre nova et vetera» (Mt 13,52), qui demande courage et discernement pour ne pas «enterrer les talents que le Seigneur met entre nos mains» (cf. Mt 25,14-30). Le Pape a conclu en remerciant les Supérieurs pour «la tâche difficile et délicate» qu’ils accomplissent, leur assurant sa proximité spirituelle.